La beauté est la clé du mystère
En 1999, le pape Jean-Paul II choisit d’adresser une longue lettre aux artistes, eux qui « avec un dévouement passionné, cherchent de nouvelles “épiphanies” de la beauté pour en faire don au monde dans la création artistique », comme il les définit dans le sous-titre. Une lettre très personnelle, dans laquelle le pape polonais, qui écrivit lui-même des pièces de théâtre, dit se sentir « très lié » aux artistes, « par des expériences qui remontent très loin dans le temps et qui ont marqué [s]a vie de façon indélébile ». Cette lettre est donc l’un des actes majeurs du Magistère de l’Église pour dire le rapport qu’entretiennent les catholiques avec la beauté.
« Personne mieux que vous artistes, géniaux constructeurs de beauté, ne peut avoir l’intuition de quelque chose du pathos avec lequel Dieu, à l’aube de la création, a regardé l’œuvre de ses mains. » Pour Jean-Paul II, en produisant une œuvre artistique, « Dans la “création artistique”, l’homme se révèle plus que jamais “image de Dieu” : “L’Artiste divin, avec une complaisance affectueuse, transmet une étincelle de sa sagesse transcendante à l’artiste humain, l’appelant à partager sa puissance créatrice.”
« La beauté est en un certain sens l’expression visible du bien, de même que le bien est la condition métaphysique du beau », écrit Jean-Paul II, reprenant à son compte le lien établi par Platon entre le bon et le beau. Des paroles qui font écho au passage que le Catéchisme de l’Église Catholique consacre à la beauté : « Avant même de Se révéler à l’homme en paroles de vérité, Dieu Se révèle à lui par le langage universel de la Création, œuvre de Sa Parole, de Sa Sagesse : l’ordre et l’harmonie du cosmos — que découvre et l’enfant et l’homme de science — “la grandeur et la beauté des créatures font, par analogie, contempler leur Auteur” (Sg 13, 5), “car c’est la Source même de la beauté qui les a créées” (Sg 13, 3). »
C’est pourquoi, reprend Jean-Paul II dans sa Lettre aux artistes, la beauté est une « vocation » humaine, appelant tout homme « qui perçoit en lui-même cette sorte d’étincelle divine qu’est la vocation artistique » à « développer ce talent pour le mettre au service du prochain et de toute l’humanité ».
Au seuil du troisième millénaire, le pape lançait ce message à tous les artistes : « Puisse la beauté que vous transmettrez aux générations de demain être telle qu’elle suscite en elles l’émerveillement ! Devant le caractère sacré de la vie et de l’être humain, devant les merveilles de l’univers, l’unique attitude adéquate est celle de l’émerveillement. » Car « La beauté est la clé du mystère et elle renvoie à la transcendance ». Elle est une invitation à savourer la vie et à rêver de l’avenir. C’est pourquoi la beauté des choses créées ne peut satisfaire, et suscite cette secrète nostalgie de Dieu qu’un amoureux du beau comme saint Augustin a su restituer par des mots sans pareil : « Bien tard, je t’ai aimée, ô Beauté si ancienne et si neuve, bien tard, je t’ai aimée ! »
« Dieu vit que cela était bon »
Le billet spirituel du Père Machenaud, conseiller ecclésiastique de la Confédération nationale des AFC.
Au début de chaque printemps, nous admirons la beauté de la Création. En écoutant les oiseaux, en voyant les bourgeons, nous sommes émerveillés. Nous pouvons voir la beauté de la Création dans la Genèse où « Dieu vit que cela était bon » à travers toute cette Création. Pour certains, ce sera plutôt en montagne, pour d’autres en bord de mer, pour d’autres dans le désert, que sais-je ! Qui ne s’est jamais émerveillé devant un nouveau-né en disant : « Qu’il est beau ! » ? Dans la beauté de la Création, nous pouvons découvrir la beauté de Dieu. Dans le psaume 26 au verset 4, on peut admirer le Seigneur dans sa beauté et il est même dit « L’Éternel est beau ». On parle de cette beauté divine qui est souvent associée à la bonté divine et à la justice divine. La beauté de Dieu est perçue bien souvent comme une source d’admiration et d’émerveillement, qui invite les croyants à chercher une relation de plus en plus profonde avec lui. Il y a bien sûr aussi la beauté humaine, en lien avec la vertu et la morale. Et la première des humaines est la Vierge, qui porte à la fois une beauté extérieure et une beauté intérieure, par sa pureté et sa bonté. L’art peut aussi nous aider à développer cet émerveillement : comment l’humain à travers l’art peut exprimer la beauté. Nous voyons cela enfin à travers la beauté de la Rédemption. La beauté est en effet très liée à la Rédemption et à l’espoir. Dans tout le Nouveau Testament, nous découvrons la beauté de la vie chrétienne, qui est souvent associée à la transformation intérieure que l’on expérimente par la foi dans le Christ. Espérer contre toute espérance. Nous sommes témoins de cette beauté spirituelle, en cette année où nous voyons de plus en plus d’adolescents et d’adultes qui demandent le baptême. Alors puissions-nous nous émerveiller de tout cela ! Et Dieu vit que cela était très bon.