11/05/2021

Quelle vigilance éthique sur les chimères ? (RCF)

Dans une tribune, Pierre Savatier, directeur de recherche à l’INSERM plaide pour l’utilisation de chimères en recherche fondamentale.

Chronique des AFC sur RCF le mardi 11 mai

Interdiction des chimères ?

Les chimères sont des organismes ayant des cellules provenant de deux ou plusieurs individus de la même espèce ou d’espèces différentes. Des chercheurs de deux équipes, dont celle, française, de Pierre Savatier, ont récemment introduit des cellules humaines dans des embryons de singe et ont cultivé ces chimères homme-singe quelques jours en laboratoire.

Pour le moment, la loi interdit “la création d’embryons transgéniques ou chimériques”. L’article 17 du projet de loi de bioéthique, s’il était voté à l’issue de la troisième lecture, supprimerait cette interdiction. L’équipe française qui a créé un embryon singe-homme, pratique ainsi la politique du fait accompli pour pousser à faire entériner par la loi un procédé jusqu’alors interdit.

Lors des deux premières lectures du texte de loi, il a beaucoup été dit dans les deux assemblées que ce procédé permettrait la création de greffons humains que l’on pourrait cultiver chez des animaux puis implanter chez l’homme. Ce même chercheur reconnaît que cela ne pourrait survenir avant des dizaines d’années. Il invoque des motifs de progrès dans le soin des maladies neurodégénératives ou dans la connaissance du développement des embryons humains pour améliorer la fécondation in vitro.

Un but lucratif

Une course internationale est engagée pour guérir ces maladies et améliorer la chaine de production humaine artificielle. Course dont les bénéfices seront incroyablement lucratifs. Mais avec tous les risques éthiques de l’instrumentalisation humaine et du franchissement de la barrière entre les espèces aux conséquences non maitrisées, potentiellement incalculables et à rebours d’une élémentaire prudence écologique. La création de chimères est l’un des points très controversé du projet de loi de bioéthique. Le Sénat s’y est opposé avec bon sens à deux reprises. Seule l’Assemblée l’a votée en seconde lecture, le 1er août dernier. Il faut rappeler aux parlementaires la vigilance éthique qu’ils se doivent d’opposer aux appétits de biologistes qui se comportent en véritables apprentis sorciers. Ou alors cesser de parler de bioéthique pour voter des textes qui ne sont ni écologiques, ni éthiques.

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